Le blog de Stéphane Gouret

24 mars 2009    business · mobilités et transport   

Publié par Stéphane Gouret

Nouvelle Citroën DS : mythique ou mitée ?

La nouvelle Citroën DS : comme passer du mythe aux mites.

La nouvelle Citroën DS3 : comme passer du mythe aux mites.

Le monde automobile sombre depuis 6 mois à une allure vertigineuse dans une crise économique sans précédent, où les surcapacités de production de chaque constructeur et à l’échelle mondiale démontrent enfin l’absurdité du modèle économique du secteur, chacun y allant de son arrogante ambition à vouloir augmenter sa part de marché, multiplier son offre produits, prendre sa part du gâteau des marchés émergents, afficher des taux de marges passablement irréalistes et prompts à rassurer les actionnaires.  Une industrie qui oublie de se renouveler va au casse-pipe, disait madame Claude, et mise à part Renault avec sa Low-Cost Logan ou Toyota avec sa Prius hybride, pas grand chose de nouveau sous le soleil depuis 20 ans.

Las, l’industrie automobile mondiale s’écroule comme un château de carte, poussée par l’apoplexie des Big Three, GM, Ford et Chrysler. Une question tourmente la plupart des conseils d’administration et alimente les rumeurs les plus folles : qui va coucher avec qui ? Fiat avec Chrysler ? Peugeot avec Mitsubishi ou avec BMW ? On évoque même la liaison la plus consanguine qui soit, une union Renault/PSA… Une misère. Les plus pessimistes prédisent la disparition des plus petits, Saab et Volvo en tête, ou des plus fragiles, Opel ou Chrysler. Bref, une tuerie qui renvoie définitivement Massacre à la tronçonneuse au rayon des films pour enfants.

Les constructeurs français, pétris par l’angoisse de la disparition, ressortent de vieilles gamelles pour servir au consommateur une soupe bien tiède. Les voici qui versent en effet dans une tendance marketing qui s’essoufle, le « retro-design» , tendance inaugurée il y a belle lurette par Volkswagen avec sa New Beetle (1998), reprise par la suite et avec plus d’élégance par BMW pour sa Mini (2001), et dont le paroxisme semble être atteint par Fiat avec sa 500 version 2008, incapable de renouveler son image de marque autrement qu’en revenant 50 ans en arrière.

Logos Suez et Citroën : la même agence ou un consensus mou ?

Logos Suez et Citroën : la même agence ou un consensus mou ?

Citroën a ouvert le bal avec un joli coup de pub en dévoilant le même jour son nouveau logo (dont les courbes ne sont pas sans rappeler, au passage, le logo de GDF-Suez…) et une nouvelle gamme de voitures, baptisée DS, en référence à sa mythique berline de 1955, immortalisée par Roland Barthes et honorée par une apparition dans de nombreux films américains, dont  Brazil en 1985 et Bienvenue à Gatacca en 1997. Citroën doublera ainsi chaque segment de gamme par un véhicule premium (C3 et DS3, C5 et DS5, etc…). Ca s’appelle l’art de la segmentation.

Pourquoi DS ? Pour Different Spirit nous dit le service communication de la marque aux chevrons mous, pas pour le concept « Developer’s system»  de Nintendo, et c’est bien dommage.  Je vous laisse analyser longuement la silhouette de la bête pour me faire part de votre avis sur la dimension « Different Spririt»  de l’engin. Moi je cherche toujours. Les plus perspicaces auront noté la référence à l’inoubliable DS, le toit blanc. Pour le reste, ça sent plutôt le bling-bling pas frais…

Et Renaut nous annonce une remise au goût du jour de la marque Gordini, fier préparateur des R8 et autre Alpine d’autrefois. Amis de l’innovation, faudra repasser…

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Tags: business · mobilités et transport

10 commentaires

  • 1 F. Degouzon // mar 26, 2009 at 22 h 20 min

    Excellent petit billet d’humeur. J’en profite pour signaler un fait d’actualité peu médiatisé ici, à savoir le probable rapprochement entre Fiat et Tata, qui vient de lancer la Nano et prévoit dans le même temps de produire des Ferrari en Inde.
    Voir l’instructif interview du patron de Tata Motors ici :
    http://timesofindia.indiatimes.com/Peoples-car-an-idea-whose-time-has-come-Ratan-Tata/rssarticleshow/4291635.cms

  • 2 Maxime // mar 28, 2009 at 14 h 09 min

    Enfin le billet tant attendu !
    En tous cas les budgets communication fonctionne à plein régime pour Citroën en ce moment !
    http://www.patricecassard.com/2009/02/16/me-gusta-la-felacion/

  • 3 Anne Delfaut // mar 29, 2009 at 3 h 32 min

    En 1985 on disait de la campagne «Les chevrons sauvages» qu’elle inaugurait l’ère de la publicité spectacle…
    Comment aller de l’avant avec deux lettres toujours mythiques 50 ans après ? Inaugurons nous l’ère de la DS for Desperate Strenght (?)

    Le dossier de presse nous dit à propos du logo « Les chevrons (…) en trois dimensions pour évoquer la conquête, la puissance et la technologie» , ils sont donc nombreux les logos à devoir évoquer ces trois éléments si l’on en croit le nombre d’identités qui sont en gris et en 3 D. J’ai des difficultés à adhérer au fait que des formes rondes, molles et de couleur neutre mettent en valeur ces trois mots. Avec cette utilisation de la couleur l’identité perd en impact visuel c’est certain.

  • 4 Frederic // mar 29, 2009 at 14 h 14 min

    Je serai concis : elle est franchement moche, même si elle a un air de famille avec la mythique DS, mais alors de très très loin. Ses gènes se sont sans doute perdus au fil des générations … : (

  • 5 F. Degouzon // mar 29, 2009 at 18 h 26 min

    Au fait, tout le monde sait bien sûr d’où viennent les chevrons « qui expriment technologie, puissance et conquête»  http://blog.caminteresse.fr/archives/233

  • 6 Designland // avr 2, 2009 at 11 h 19 min

    Sans nostalgie, il n’est pas sans objet de parler du passé, le revisiter, le remettre en scène, l’améliorer. Bien sûr, ce n’est pas sans stratégie qu’un constructeur s’engage dans cette voie. On peut l’interprêter comme une panne d’idées nouvelles, mais le résultat est parfois bien séduisant. Que reprocher à cette croquignolette 500 ? Certainement pas sa petite frimousse aux phares ronds et bien posées ni sa tenue de route, largement améliorée par rapport à celle de son ancêtre. Non, il n’y a rien de nouveau, sauf que c’est de l’ancien bien amélioré. Bravo. On ne peut en dire autant de la Beettle qui n’avait plus rien à voir avec une Cox ni de la nouvelle Mini qui n’a plus rien de mini, justement.
    On peut reprocher à Fiat de pratiquer un marketing de « rareté» , qui fait attendre le client si longtemps pour obtenir sa 500. Preuve que Fiat est bien conscient de n’avoir mis sur les routes qu’un véhicule niche et non une voiture populaire. Les temps ont vraiment changé. Qui veut encore d’une voiture « populaire» , mmmmmmmh ?
    Avec DS, on a l’impression que Citroen se moque de nous. Ils nous font le coup de la danseuse nue qui met un temps fou à s’effeuiller. comme la nouveauté (s’il y en a) doit savoir se faire attendre, Citroen a décidé de nous faire patienter… ce qui donne encore un peu de temps pour avoir de véritables bonnes idées. Non, elle n’est pas moche, cette petite auto, mais elle n’a tout simplement rien à voir avec une antique DS, qui mérite d’être réactualisé, tant son style générique reste intemporel.
    Coté innovation, oui, nos constructeurs manquent singulièrement d’audace et de vision surtout. Mais qui veut vraiment de « l’innovation»  dans son auto ou dans les usages qui vont avec ? Observez donc comme l’auto-partage est si peu… partagé.

  • 7 MERLET Pierre-Charles // avr 10, 2009 at 17 h 27 min

    A défaut de réelles innovations en terme d’automobile… Il faut reconnaître que la brochure manque pas d’originalité…

    http://www.dailymotion.com/video/k1AfXBMZjY2fKKWkmI

  • 8 Jocelyne Le Boeuf // mai 10, 2009 at 11 h 13 min

    Puisque l’histoire est convoquée, voici un extrait d’un petit texte que j’avais écrit en 2002 pour les éditions Autrement (1950-2000, Arts contemporains, J. Le Boeuf, Chapitre sur le design P. 269-296, SCEREN/Autrement, 2002

    L’élégance aérodynamique

    Flaminio Bertoni et le bureau de style Citroën, la DS 19, France, 1955

    La sobriété du titre, La nouvelle Citroën, donné par Roland Barthes à l’un de ses textes des Mythologies écrits entre 1954 et 1956, contraste avec “ l’objet superlatif”, la “ Déesse ”, ce “ nouveau nautilus ” dont il analyse le phénomène. La DS dessinée par Flaminio Bertoni fait partie de ces authentiques créations visionnaires qui ont jalonné l’histoire de l’automobile.
    Le mythe voudrait qu’elle fût tombée du ciel… Le projet d’une voiture innovante et “ haut de gamme ” était préparé en fait depuis plusieurs années en grand secret, avec juste ce qu’il faut de fuites, dans l’Auto-Journal en particulier, pour exciter la curiosité du public.

    Le discours très technologique tenu par Citroën – suspension hydropneumatique, aérodynamisme, tests en soufflerie, direction assistée, etc. – démontre qu’une marque populaire française peut s’affirmer face aux grands de l’automobile américaine. Mais la réussite médiatique de la DS tient sans doute surtout à sa ligne élégante et futuriste, non sans point commun avec la Studebaker 53 de Raymond Loewy.

    Notre “ déesse ” descend de toute une lignée de recherches qui, à partir des années 30, ont rompu avec les premiers modèles aux formes inspirées des carrosseries hippomobiles telle La Ford T produite par Henry Ford aux Etats-Unis dans la deuxième décennie du siècle. Les recherches sur l’aérodynamisme menées depuis la fin du XIXe siècle et les nouvelles possibilités apportées par les matériaux (acier chromé, bakélite, aluminium…) ont contribué à développer une approche novatrice de la conception automobile dans la décennie précédant la Seconde Guerre mondiale, aussi bien en Europe qu’en Amérique. La crise économique de 1929 et la nécessité de relancer la consommation prolongeront ce mouvement aux États-Unis en donnant naissance aux premières agences de design industriel. La forme profilée, streamlined, expression métaphorique de la modernité, contaminera les objets du quotidien, l’architecture, les œuvres de fiction, le cinéma… Les partis pris stylistiques des premiers designers américains (surfaces lisses, brillantes, formes courbes…) seront à l’honneur dans cette formidable mise en scène futuriste que représentera la Foire mondiale de New York en 1939.

    Largement nourrie de références à l’aéronautique, la veine baroque du Streamline automobile donnera ces voitures de rêve, telle la célèbre Cadillac Eldorado de Harley Earl, produite par General Motors en 1958. Face à ces “ belles américaines ” symbolisant l’Amérique victorieuse, l’aérodynamisme sobre de la DS évoque plutôt les nouvelles lignes du design organique en vogue dans les années 50, comme celles de la chaise Tulip d’Eero Saarinen ou des modèles présentés dans la revue Domus, créée par Gio Ponti.

    La DS 19 représente une époque où l’on parlait de stylisme et non de design dans le domaine automobile, où la réussite passait par la rencontre entre le flair esthétique des créateurs descendants des anciens carrossiers et l’audace novatrice de grands patrons d’industrie. La question des mots n’est pas innocente. On a longtemps considéré qu’il s’agissait d’un secteur qui n’avait pas gagné ses lettres de noblesse par rapport au design industriel rationaliste, parce que surtout préoccupé par les aspects formels. Ce jugement a été cependant largement compensé par l’aura qui reste attachée aux grands noms comme Pininfarina et Flaminio Bertoni.

  • 9 yannigroth // oct 26, 2009 at 0 h 03 min

    Au début du post, j’étais encore assez séduit par la petite Citroën qui nous est présentée là, mais à force de vous lire, et surtout après avoir vu l’interview du DirCom de Citroën dont Pierre-Charles a donné le lien, j’avoue être un peu plus sceptique…

    Comment veulent-ils que le consommateur lambda comprenne que ce n’est « pas du revival»  ?

    S’ils s’attendent à un espèce de « transfert d’émotion»  du à la griffe DS, pourquoi n’ont-ils pas pensé à cela pour la dernière C5 ? Ou la prochaine ?

    Le logo, par contre, je l’aime bien. Ce n’est pas révolutionnaire certes, mais on y reconnaît toujours les chevrons et ils sont plus jolis sur les calandres maintenant.

  • 10 Le lion perd sa langue « creaRtivity // jan 25, 2010 at 1 h 39 min

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